Des jeunes du Réseau des Jeunes pour l’Intégration Africaine (RJIA) avec Spero Stanislas Kpakpovi Adotevi, philosophe et homme politique africain


Depuis 1999, l’Assemblée générale des Nations Unies a institué la commémoration de la Journée internationale de la jeunesse le 12 août de chaque année. Le but est « d’attirer l’attention de la communauté internationale sur les problèmes de la jeunesse et célébrer le potentiel des jeunes en tant que partenaires dans la société ». Pour cette année 2022, le thème se formule comme suit : « Solidarité intergénérationnelle : créer un monde pour tous les âges ». Une telle thématique nécessite que l’on regarde de près certaines questions qui touchent la variable universelle qu’est l’âge, et qui influent sur la qualité des rapports intergénérationnels.

La planète se rajeunit mais la jeunesse souffre encore d’exclusion politique

Selon les Nations unies, « la moitié des habitants de notre planète ont 30 ans ou moins, et ce chiffre devrait atteindre 57% à la fin de 2030 ». S’agissant de l’Afrique, à l’horizon 2050, plus de la moitié de la population du continent aura moins de 25 ans[1] et 35% des jeunes dans le monde seront des Africains ; une proportion en forte évolution car, elle n’était que de 15% en 2000[2]. La forte croissance de la population jeune ne rime malheureusement pas avec son implication dans les hautes sphères de la société, notamment celle politique. Au niveau mondial, renseigne les Nations unies, « seuls 2,6% des parlementaires ont moins de 30 ans » et de souligner que « la majorité des gens sont d’accord pour dire que l’équilibre des âges en politique n’est pas bon. Plus de deux tiers (69%) des personnes, toutes tranches d’âge confondues, conviennent que l’amélioration des systèmes politiques passe par l’augmentation des possibilités pour les jeunes d’avoir leur mot à dire dans l’élaboration et la modification des politiques. ». Ces quelques données statistiques laissent percevoir un paradoxe qui justifie l’antagonisme intergénérationnel aussi bien dans le monde, en général, qu’en Afrique, en particulier. Tout compte fait, c’est une “anomalie” qu’il faut soigner pour le bien-être de tous.

© Denis Ngai

Eradiquer le « racisme lié à l’âge » pour soigner le monde

L’âgisme, selon le dictionnaire “Le Grand Robert”, est une « discrimination envers toute personne âgée ». Dans ce sens, il s’oppose au jeunisme défini comme « attitude de prévention systématique contre les jeunes ». Désormais, une autre approche de la question de l’âge permet à toute les générations de se sentir concernées. Il s’agit d’entendre par âgisme, « toutes les formes de discrimination, de ségrégation, de mépris fondées sur l’âge. »

Ainsi, le discours sur les rapports intergénérationnels doit être structuré dans les deux sens. En effet, il ne faut plus qu’un jeune soit bloqué dans l’expression de ses compétences parce qu’étant « trop jeune », d’une part, et qu’une personne âgée soit exclue parce que taxée de « vieille ». Il faut déconstruire les deux stéréotypes négatifs associés à l’âge tels que déclinés par Adam, Stéphane, Sven Joubert, et Pierre Missotten[3]:  

  • les fonctions mentales déclinent avec l’âge ;
  • les jeunes sont meilleurs que les âgés.
© RJIA au Sénégal, 2015

Le danger serait de croire donc que la jeunesse est un atout infaillible et la vieillesse un handicap certain à la capacité de réflexion et d’action en faveur du développement social. A l’occasion de la célébration de la 23e édition de cette journée dédiée à la jeunesse, le thème se doit d’être compris comme une interpellation forte à l’égard des dirigeants, mais aussi de la population mondiale sur le fait que seule une synergie intergénérationnelle permettra de relever bien des défis humains, économiques et politiques de nos sociétés qui vivent encore dans le clivage antagoniste jeunes-vieux.

Bonne commémoration à la jeunesse mondiale, à celle africaine dans le monde !

Davy SOMA
Rédacteur en Chef “Jeunesse Academy”


[1] Rapport  “Africa Youth Survey” 2020 cité dans https://afriquemagazine.com/une-jeunesse-en-chiffres

[2] https://ideas4development.org/jeunesse-africaine-avenir-continent/

[3] Adam, Stéphane, Sven Joubert, et Pierre Missotten. « L’âgisme et le jeunisme : conséquences trop méconnues par les cliniciens et chercheurs ! », Revue de neuropsychologie, vol. 5, no. 1, 2013, pp. 4-8.