Parmi les procédés de règlement des contentieux dans le milieu des affaires, l’arbitrage et la médiation sont recommandés le plus aux différentes parties. Dans cet article, deux spécialistes nous apportent des explications sur lesdits procédés. Avec Mme Sylvie K. Ouédraogo/Thiombiano, Juriste et Conseillère Spéciale du Médiateur du Faso, et Maitre Souleymane A. Ouédraogo, Avocat à la Cour et Arbitre, voici décryptées dans les lignes qui suivent, ces deux notions. C’est indistinctement, que nous vous partageons les réponses obtenues auprès d’eux pour éclairer les lanternes de nos lecteurs.

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Maître. Souleymane A.Ouédraogo ©JA
Mme Sylvie K. Ouédraogo/Thiombiano ©JA

Avant de faire un choix entre deux procédures, il faut, pour les parties au litige, savoir au préalable ce qui les distingue. Ainsi, il nous est paru nécessaire de poser en premier les différences entre arbitrage et médiation.

Différences entre arbitrage et médiation

Sur le plan de la définition, l’arbitrage est un mode juridictionnel de règlement des litiges par lequel les parties confient conventionnellement, à une ou plusieurs personnes privées, appelées arbitres, la mission de trancher leur différend. Quant à la médiation, elle est un processus amiable de résolution des litiges par lequel un tiers indépendant, neutre et impartial, formé aux techniques de la médiation, établit ou rétablit la communication entre les parties, afin qu’elles trouvent un accord acceptable et, si possible, satisfaisante pour chacune d’elles. Ces deux définitions portent en elles-mêmes des distinctions qu’il convient de relever.

Mais avant, nos spécialistes précisent le fait que l’arbitrage et la médiation appartiennent à la grande famille des Modes Alternatifs de Règlement de Litiges (MARL).

Revenant sur les distinctions, ils soulignent d’abord que l’arbitrage est une procédure juridictionnelle en ce sens qu’il respecte les principes directeurs d’un procès. La médiation, quant à elle, est un processus amiable de négociation assistée. En conséquence, le médiateur et l’arbitre n’ont pas les mêmes missions.

En effet, le tribunal arbitral a pour mission de trancher le litige qui lui est soumis ; il a une part active dans la procédure car il doit rendre une décision. Le médiateur a plutôt une mission d’accompagnateur, qui facilite la communication entre les parties qui trouvent elles-mêmes la solution à leur litige. Le médiateur est tout simplement un catalyseur, à la différence de l’arbitre. Ainsi, il parait évident que l’issue de chacune de ses procédures ne soit pas de même nature.

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Quand la procédure d’arbitrage prend fin, c’est par une sentence arbitrale qui a la même valeur qu’une décision de justice. Elle est donc obligatoire entre les parties et peut faire l’objet d’exécution forcée. Pourtant, la finalité de la médiation dépend de la bonne foi des parties. Dans le meilleur des cas, le processus prend fin par la signature d’un accord de médiation même si cet accord, il faut le noter, peut également faire l’objet d’exécution forcée. Toutefois, en l’absence d’accord, ce qui est le pire des cas, le médiateur dresse seulement un procès-verbal de non conciliation qui constate l’échec de la médiation.

Des deux procédures, laquelle choisir ? Pour un choix éclairé, les avantages de chacune d’elle doivent être connus. L’avocat arbitre, Maitre Ouédraogo, et la juriste médiatrice, Mme Ouédraogo/Thiombiano nous en disent plus.

Avantages de la médiation et de l’arbitrage

Si ces procédures sont si recommandées, c’est parce qu’elles offrent beaucoup d’avantages aux acteurs économiques. A partir de réponses obtenues, on peut retenir, entre autres, la célérité qui se traduit dans les délais de traitement. Concrètement, le tribunal arbitral dispose d’un délai maximal de six (06) mois pour rendre la sentence tandis que le médiateur a deux (02) mois au maximum pour accompagner les parties dans la recherche de solution. La confidentialité est également un avantage qui préserve le secret du litige. En effet, les audiences et les réunions durant les deux procédures se tiennent à huis clos ; ce qui fait que les deux revêtent ce caractère confidentiel. Dans le milieu des affaires, c’est très bénéfique pour préserver de bonnes relations avec les autres partenaires.

Outre la célérité et la confidentialité, on peut aussi reconnaitre la souplesse de la procédure. Les parties peuvent choisir le lieu, la langue, certaines règles de procédures et participent même à l’élaboration de l’acte de mission du tribunal arbitral et la programmation des réunions de médiation. Cette souplesse s’accompagne de la liberté qu’ont les parties de choisir l’arbitre ou le médiateur qu’elles veulent. Pour ce faire, il leur est présenté la liste des arbitres et médiateurs agréés près le CAMC-O. Toutefois, elles ont également la possibilité de choisir en dehors de cette liste.

A ces avantages s’ajoute la continuité des relations d’affaires. En effet, les procédures qui mettent les parties au centre du règlement de leurs litiges sont administrées dans un cadre apaisé, et cela permet la poursuite des relations d’affaires.

Le déroulement pratique d’une médiation et d’un arbitrage

De façon très synthétique, la médiation commence par une demande adressée au Secrétaire Permanent, accompagnée des frais d’ouverture du dossier. La demande contient un exposé des faits et des circonstances de la cause et précise l’objet de la saisine. Puis, le médiateur (ou les médiateurs) est désigné par les parties, conformément aux modalités prévues par leur accord, sur la liste des médiateurs du Centre. Puis des assemblées, voire des apartés sont organisés pour régler le litige. Le médiateur doit boucler le processus dans un délai maximum de deux (02) mois, ou par un accord de médiation, ou par un Procès-verbal (P-V.) de non conciliation.

Pour ce qui est de l’arbitrage, c’est également par voie de demande mais plus formelle que celle de la médiation, avec frais d’ouverture, accompagnée d’un exposé des faits, des moyens et prétentions du demandeur. Le défendeur en est informé, avec des délais de réponse. La désignation de l’arbitre (ou des arbitres) est faite par les parties, avec l’intervention souvent du Comité d’arbitrage et de médiation pour éviter le surplace. Une fois le tribunal arbitral mis en place, la première audience est convoquée pour la signature de « l’acte de mission » et du calendrier de la procédure. Le tribunal a six (06) mois maximum pour rendre sa décision.

En termes de délai, pour résumer, il ne peut excéder trois (03) mois pour ce qui est de la médiation et douze (12) mois pour l’arbitrage.

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Ce qui peut se passer en cas de désaccord à l’issue de ces MARL

Dans une procédure de médiation, si les parties ne parviennent pas à un accord et un Procès-Verbal de non conciliation est établi, elles peuvent décider de recourir à l’arbitrage.

Dans la procédure d’arbitrage, il faut le préciser, le tribunal ne vise pas un accord entre les parties. Contrairement à la médiation, l’arbitrage ne peut pas se solder par un échec car, en tant que mode juridictionnel de règlement de litige, il tranche définitivement le litige qui oppose les parties par le prononcé d’une « sentence arbitrale ».

En cas d’absence ou de présence d’opposition à l’issue de ces procédures…

Il peut arriver qu’une des parties, en médiation ou en arbitrage, refuse d’exécuter l’accord de médiation ou la sentence arbitrale. Ce sont des hypothèses qui ne sont pas à exclure. Comme les décisions de justice, les parties en médiation et en arbitrage doivent exécuter de bonne foi les décisions rendues. Donc, si les parties parviennent à un accord, elles sont tenues de l’exécuter volontairement et de bonne foi. Le même principe est de mise en matière d’arbitrage, à savoir l’exécution volontaire et de bonne foi de la sentence arbitrale. Mais il peut arriver qu’une des parties, en médiation ou en arbitrage, refuse d’exécuter l’accord de médiation ou la sentence arbitrale. Ce sont des hypothèses qui ne sont pas à exclure. En pareilles circonstances, il appartient alors à la partie la plus diligente, en médiation, de faire homologuer l’accord de médiation par devant notaire ou le juge sur simple demande. En matière d’arbitrage, en cas de refus d’exécuter la sentence, la partie la plus diligente y fait apposer la formule exécutoire. La sentence, dès lors, est susceptible d’exécution forcée. Une fois cela fait, l’exécution forcée, par le truchement d’un Huissier peut être envisagée.

Pour ce qui est des contentieux impliquant des contrats internationaux

Sur cette question, il faudrait noter que l’Acte Uniforme sur le Droit de l’Arbitrage (AUDA), qui régit l’arbitrage dans l’espace OHADA, a vocation à s’appliquer à tout arbitrage, selon qu’il soit civil ou commercial, interne ou international. Il est clair que l’acte Uniforme ne fait aucune distinction quant à la nature du litige. Cependant, en matière d’arbitrage international (contentieux impliquant les contrats internationaux), les parties ont une plus grande liberté dans le choix des règles de procédure, du siège du Tribunal arbitral et du droit applicable au fond du litige. Cette liberté ne doit pas pour autant remettre en cause les principes qui gouvernent les procédures d’arbitrage, notamment l’égalité de traitement des parties dans le strict respect du contradictoire.

Taux de succès et limites de l’arbitrage et de la médiation

Tel que défini plus haut, l’arbitrage est comparable à une véritable procédure judiciaire. En optant pour l’arbitrage, les parties ont toujours toutes les garanties d’avoir une décision qui mettra fin à leur litige, à moins qu’elles aient renoncé à leur volonté première. Par contre, le succès d’une médiation repose sur la bonne foi des parties. Les parties doivent agir de bonne foi au cours du processus pour permettre le dénouement du litige. Au CAMC-O, le taux de succès de la médiation oscille entre 60% et 80% des dossiers de médiation traités. Si ces modes de règlement des litiges connaissent des avantages incontestables pour les milieux d’affaires, ils présentent certaines limites.

La première limite tient au fait que tous les litiges ne peuvent pas faire l’objet d’un arbitrage ou d’une médiation, à la lumière de notre législation. Seuls les droits commerciaux ou ceux sur lesquels les parties ont la libre disposition peuvent être traités en arbitrage ou en médiation. La deuxième limite est relative aux coûts de l’arbitrage et de la médiation. Ce sont les parties qui rémunèrent les arbitres, les médiateurs et l’institution de mise en oeuvre, éventuellement les avocats/conseils qui les assistent dans les procédures. Cependant, il faudrait souligner que les coûts des procédures au CAMC-O sont prévisibles et vraiment maitrisés.

Les conseils des spécialistes aux acteurs du monde des affaires

Selon leur expérience, nos spécialistes conviennent qu’il est essentiel, pour se lancer dans une affaire, de bien préparer l’accord ou le contrat d’affaires qui servira de base à une bonne relation de partenariat. Pour ce faire, les opérateurs devraient toujours se faire accompagner par les experts, tels que les avocats et les notaires, qui pourraient mettre en place des outils juridiques appropriés pour détecter, sécuriser, traiter et résoudre efficacement le contentieux naissant. Leur principal conseil à l’endroit des jeunes entrepreneurs, en cas de litiges, c’est de toujours recourir aux modes alternatifs de règlement tels que l’arbitrage et la médiation car, pour eux, ce sont de véritables outils de management et de gestion optimale des litiges d’affaires.

La Rédaction