Juriste d’affaires et doctorante en Droit privé et Sciences criminelles, Salimata Nah Somé/Traoré, à moins de 30 ans, possède un parcours inspirant. Elle est originaire de la province du Sourou (Tougan), plus précisément du village de Kougni, mais a passé une grande partie de sa vie dans la ville de Banfora dans la région des Cascades. Mariée et mère d’un enfant, elle fait actuellement une thèse en Droit privé et sciences criminelles à l’Université de Bordeaux en France. Après la réussite à son baccalauréat littéraire (Série A4) au Lycée Provincial Lompolo Koné de Banfora, Salimata a obtenu une Licence en droit privé puis un Master en droit des affaires à l’Université Aube Nouvelle de Bobo-Dioulasso. Parallèlement à sa vie d’étudiante, elle participe à des rencontres à l’international dans le cadre de programme d’échanges culturels, de rencontre scientifique et surtout de compétition d’art oratoire. Elle a été lauréate du championnat national de débat et d’art oratoire en 2015 puis Championne internationale de Débat francophone organisé par l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF), le 17 mars 2017 au Liban. Salimata s’est aussi démarquée à travers ses pertinentes questions adressées au président français Emmanuel Macron en visite au Burkina à l’université Joseph Ki-Zerbo en 2017.


Étudiante en France, Salimata Nah Somé/Traorè est une jeune burkinabè qui a fait une partie
de ses études universitaires dans la ville de Bobo-Dioulasso. Passionnée d’art oratoire et donc très
à l’aise dans la prise de parole en public, c’est une jeune dame extravertie qui n’hésite pas à s’ouvrir
au monde et aux opportunités qui s’offrent à elle. Dans les lignes qui suivent, elle nous partage son
expérience de doctorante à Bordeaux et de ses ambitions professionnelles.


Malgré son retard académique à son arrivée en France pour des questions de formalités et de visa, Salimata n’a pas tardé à prendre le train en marche. Arrivée en janvier 2019 alors que l’année académique française avait commencé depuis septembre, elle s’est vite adaptée comme tous les doctorants étrangers et particulièrement africains. Après son Master 2 en droit des affaires, elle n’avait pas vraiment envisagé poursuivre immédiatement en thèse. Aspirant à cette époque à la profession d’avocate, Salimata était dans l’attente du lancement du test d’entrée au centre de formation professionnelle des avocats qui tardait à se manifester. C’est alors que l’opportunité de la thèse s’est présentée à elle à travers une bourse d’études.« J’ai fait un petit détour, mais l’objectif reste le même avec à la clé une expérience supplémentaire dans le domaine de la recherche qui sera certainement un atout non négligeable pour ma future carrière», estime-telle. La principale raison qui a motivé notre doctorante à se lancer dans ce projet fastidieux, est la possibilité de pouvoir s’inscrire directement au centre avec le Doctorat en poche sans être obligée de passer le test qu’elle attendait tant. Par ailleurs, le besoin d’avoir un cadre de recherche hautement équipé avec toutes les commodités et les ressources bibliographiques, didactiques et humaines nécessaires à la conduite d’un travail de recherche rigoureux a été une motivation supplémentaire. « Étant très attachée à ma famille et mon cadre familier de vie, partir n’aurait certainement pas été mon premier choix si j’avais la garantie de trouver tout ce qu’il me fallait comme ressources indispensables à la bonne conduite de ma thèse » explique Salimata.

C’est ainsi que son aventure a commencé à l’Institut de Recherche en Droit des Affaires et du Patrimoine (IRDAP), rattaché à l’université de Bordeaux. Tout début n’étant pas facile, surtout lorsqu’on s’introduit dans un système scolaire et académique complètement différent, il lui a fallu s’adapter rapidement. Elle se dit personnellement chanceuse d’avoir été admise en thèse directement et malgré les particularités du système académique français qu’elle trouve très flexible, surtout au niveau doctoral. Outre le changement de système académique, les véritables défis d’adaptation auxquels elle a été confrontée sont le rythme des journées, les habitudes alimentaires, les formalités administratives pour étudiant étranger, la difficulté à trouver un premier logement… Mais, elle a su compter sur la bienveillance et la solidarité de bonnes volontés souvent issues de la communauté burkinabè. Selon elle, la thèse est un travail très prenant et solitaire, mais n’empêche pas d’envisager de faire de petits boulots. Cependant, elle n’a pas encore tenté l’expérience pour des raisons personnelles. Étant mariée et vivant une relation à distance, Salimata profite le plus souvent de ces temps libres (vacances, été, fin d’années) pour rentrer au pays afin de passer des moments de qualité avec son époux, sa famille et ses proches qui lui manquent constamment.

« Très tôt je me suis intéressée aux activités parascolaires et académiques, et cela parce que j’ai toujours estimé que la meilleure façon de s’épanouir était de se rendre utile aux autres, tout en s’enrichissant d’eux. »

Depuis qu’elle vivait au pays, elle a toujours été intéressée par les activités associatives en commençant par l’Association des élèves et étudiants musulmans au Burkina (AEEMB), passant par le club des juristes, le cercle de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), le club du Centre pour la Gouvernance Démocratique (CGD), le club des orateurs et le bureau des étudiants. « Je me suis toujours refusé d’être une simple étudiante des quatre murs qui n’avait que le nez dans ses cahiers » nous confie celle qui, aujourd’hui encore, la doctorante poursuit son engagement en participant activement aux activités de l’Association des Étudiants et Sympathisants Burkinabè de Bordeaux (AESBB). Elle y a occupé le poste de commissaire aux comptes et plusieurs autres postes de responsabilités comme à l’occasion notamment des journées culturelles et de la célébration de la journée internationale des droits des femmes. Pour mettre à profit son expertise dans le Droit, elle est également chargée des affaires juridiques de l’association Faso. Durable qui regroupe la Diaspora burkinabè de France, de la Belgique et de l’Allemagne. « Il m’arrive également de faire des activités de bénévolat au profit des personnes en difficulté par le biais d’organismes humanitaires » ajoute-t-elle.

Comme la plupart des étudiants à l’étranger, la principale difficulté pour elle est d’ordre financier. Même en bénéficiant d’une bourse, comme c’est le cas de notre étudiante, on est tout de même obligé de tirer le diable par la queue la plupart du temps. Il n’est pas rare que les virements accusent du retard. Toutes ces raisons poussent beaucoup d’étudiants à jongler entre études et petits boulots. Outre cela, il y a le climat qui n’est pas toujours clément surtout en hiver pour des Sahéliens. L’obtention de cette thèse lui offrira les clés d’une carrière d’enseignante chercheuse; c’est du moins ce qu’elle espère. Mais cette ambition n’entachera pas son objectif d’être avocate un jour, peu importe le temps que ça prendra. Ses études en France s’inscrivent dans ce sens avec toute la facilité que peut d’ailleurs conférer l’obtention d’une thèse pour son intégration au Barreau français avant celui burkinabè.

Concernant l’éventualité de revenir travailler dans son pays, elle en fait un devoir moral. Elle se fait donc la promesse de revenir pour servir son pays pour qui elle une pensée: « En étant si attachée à ma famille, vous devinerez bien qu’à ma nation cet attachement est encore plus fort, car la quiétude de la première dépend impérativement de la stabilité de la seconde. Ainsi, si loin de ma terre natale, mais si proche par le cœur, mon message prend plus les couleurs souhait ardent qui est le retour de la sécurité et de la stabilité dans nos villes et campagnes». La diaspora est une expérience dont on ne revient pas inchangé.

En dépit du fait qu’étudier à l’étranger enrichit d’une manière ou d’une autre, pour Salimata, « nous sommes le résultat d’un mélange de nos voyages et de nos rencontres. »


La Rédaction